Comment ajuster l’usage des engrais pour s’adapter aux besoins réels du sol ?

23/04/2025

Pourquoi ajuster les engrais aux besoins du sol est essentiel

Les engrais, qu’ils soient organiques ou chimiques, permettent d’assurer la fertilité et la productivité des cultures en apportant des éléments nutritifs cruciaux comme l’azote, le phosphore et le potassium (NPK). Cependant, un apport excessif ou inadapté de ces nutriments peut avoir des conséquences néfastes :

  • Sur le sol : Une surcharge d’azote peut provoquer une acidification qui appauvrit la structure et la vie microbiologique du sol.
  • Dans les écosystèmes aquatiques : Le lessivage des nitrates et des phosphates vers les rivières favorise l’eutrophisation, responsable de graves déséquilibres écologiques.
  • Climat : La volatilisation excessive de l’azote contribue à l’émission de protoxyde d’azote (N₂O), un gaz à effet de serre 300 fois plus puissant que le CO₂ sur le réchauffement global.

Selon les données de l’Organisation des Nations Unies pour l’Alimentation et l’Agriculture (FAO), près de 50 % des engrais appliqués mondialement sur les cultures ne sont pas absorbés par les plantes. Cela met en évidence un immense gaspillage de ressources et une contribution non négligeable à la pollution.

Analyser les besoins du sol : les outils disponibles

Réaliser une analyse approfondie du sol

La première étape essentielle pour ajuster les apports aux besoins réels est de mieux connaître le sol. Plusieurs éléments sont à prendre en compte :

  • La teneur en matières organiques : Un sol riche en matières organiques peut mobiliser certains nutriments naturellement.
  • Le pH : Il impacte la disponibilité des nutriments essentiels. Par exemple, un sol trop acide peut bloquer le phosphore, tandis qu’un sol alcalin peut limiter la disponibilité de certains oligo-éléments comme le fer ou le zinc.
  • La texture et la structure : Les sols légers et sableux ont une moins bonne rétention des nutriments que des sols argileux.

L’analyse chimique et biologique en laboratoire reste une méthode incontournable. Elle permet de déterminer précisément la composition et les déficits du sol. Les kits d’analyse rapide constituent une option accessible pour des diagnostics ponctuels, mais ils sont souvent moins précis que les protocoles en laboratoire.

Le rôle des outils numériques : la révolution de l’agriculture de précision

Le développement de l’agriculture numérique et de la technologie GPS offre aujourd’hui des solutions inestimables pour doser les apports en engrais de manière spécifique :

  • Cartographie des sols : Des capteurs embarqués sur des drones ou tracteurs permettent de cartographier en temps réel les variations intra-parcellaires de fertilité.
  • Systèmes d’aide à la décision : Des plateformes comme Farmstar ou Smag agrègent des données agro-climatiques et recommandations sur mesure selon les cultures et les sols.
  • Capteurs connectés : Installés directement dans le sol, ils mesurent en continu l’humidité, la température et les concentrations en nutriments pour un suivi précis.

Ces technologies permettent de combiner à la fois l’analyse fine du sol avec une application localisée et adaptée des fertilisants.

Les alternatives pour ajuster les pratiques d’amendement

Privilégier des engrais à libération lente

Les engrais à libération lente, aussi appelés engrais enrobés, libèrent les éléments nutritifs de manière progressive, suivant les besoins des plantes. Cela réduit drastiquement les risques de pertes par lessivage et de surcharge dans le sol.

Exemple : Les résines polymères utilisées pour certains engrais granulés permettent une libération contrôlée en fonction de la température et de l’humidité environnantes. Ces solutions sont particulièrement adaptées aux grandes cultures céréalières.

Adopter la fertilisation organique

Les fertilisants organiques, issus de résidus végétaux, fumiers ou composts, sont une alternative concrète à la fertilisation chimique. Non seulement ils enrichissent le sol en matières organiques, mais ils contribuent également à une meilleure rétention d’eau et une activité biologique accrue. Cependant, ils doivent être utilisés avec discernement :

  • Leur composition est variable : Certains composts peuvent être naturellement riches en phosphore, d’autres moins.
  • Nécessité de maturation : Un fumier trop frais peut brûler les cultures ou libérer du méthane, un puissant gaz à effet de serre.

Une approche mixte combinant engrais chimiques en petites quantités et amendements organiques est souvent préconisée en agriculture raisonnée.

Promouvoir la rotation culturale et les cultures de couverture

Pour agir en amont sur la préservation naturelle de la fertilité du sol, les agriculteurs peuvent opter pour des rotations de cultures ou l’utilisation de cultures de couverture comme les légumineuses, qui ont une capacité à fixer l’azote atmosphérique dans le sol.

Exemple : L’implantation d’un couvert végétal à base de trèfle ou de vesce peut réduire de 30 % les besoins d’azote de la culture suivante (source : INRAE).

Les bénéfices d’une approche raisonnée pour le long terme

Ajuster l’usage des engrais aux besoins réels ne représente pas seulement une avancée pour l’environnement : c’est aussi une opportunité pour les exploitations agricoles :

  • Réduction des coûts : Une application optimisée permet de limiter les achats d’engrais inutiles.
  • Agriculture résiliente : Des sols équilibrés et des pratiques raisonnées augmentent la durabilité et la productivité sur le long terme.
  • Valorisation commerciale : Les consommateurs accordent de plus en plus d’intérêt aux produits issus d’exploitations engagées dans des démarches responsables.

Vers une gestion des engrais toujours plus innovante

De la connaissance fine du sol grâce à la science jusqu’à l’application ultra-localisée par des outils numériques, l’adaptation des engrais aux besoins réels incarne une nouvelle ère pour la fertilisation agricole. Cependant, ces évolutions technologiques nécessitent un accompagnement des agriculteurs : sensibilisation, formation et mise à disposition de solutions accessibles doivent accompagner cette transition.

Pour demain, une fertilisation toujours plus précise et durable reposera sur trois piliers fondamentaux : un respect accru des sols et des écosystèmes, des innovations au service d’une agriculture compétitive et une meilleure diffusion des connaissances agronomiques. Cultiver mieux, c’est d’abord comprendre réellement le terrain que l’on travaille.

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