Les couverts végétaux : une révolution silencieuse pour la santé des sols agricoles

18/03/2025

Limiter l’érosion des sols : la première ligne de défense

L’érosion des sols est une problématique majeure dans de nombreuses régions agricoles. Les fortes précipitations, combinées à l’absence de couverture du sol après une récolte, entraînent souvent d’importantes pertes de terre arable. Selon l’Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), l’érosion réduit chaque année la productivité des terres agricoles et menace la durabilité de plusieurs systèmes de production, notamment dans les climats tempérés et méditerranéens.

Les couverts végétaux, grâce à leurs racines et leur biomasse, jouent un rôle crucial pour limiter cette perte. En stationnant sur les parcelles entre deux cultures principales, ils protègent la couche supérieure du sol contre l’impact direct des gouttes de pluie et réduisent l’effet du ruissellement des eaux. Leurs racines contribuent à stabiliser le sol, offrant ainsi une barrière naturelle contre la dégradation physique.

Amélioration de la structure et de la fertilité des sols

Les sols agricoles sont soumis à un usage intensif qui peut, à terme, altérer leur structure. La pratique du semis de couverts végétaux permet de prévenir ces phénomènes de compaction et de dégradation. En pénétrant le sol, les systèmes racinaires des plantes couvrantes favorisent la création de canaux naturels qui améliorent l'aération et l'infiltration de l'eau.

Mais ces bénéfices ne s'arrêtent pas là : grâce aux couverts végétaux, il est possible d'enrichir les sols en matière organique. Lorsque ces plantes sont détruites (par broyage ou enfouissement), leur biomasse se décompose pour libérer des nutriments essentiels, comme le carbone organique, le phosphore et l’azote. Ce processus contribue à nourrir les cultures suivantes tout en augmentant la capacité du sol à stocker des éléments nutritifs, limitant ainsi le recours aux engrais chimiques.

Lutter contre les mauvaises herbes et les parasites

Les couverts végétaux représentent également une solution naturelle pour maîtriser l’apparition des adventices (mauvaises herbes). En colonisant rapidement l'espace laissé libre après une récolte, ces plantes limitent la lumière et les ressources disponibles pour les adventices. Certaines espèces, comme la moutarde ou le radis, produisent même des composés allélopathiques (substances chimiques naturelles) qui inhibent la croissance des herbes indésirables.

De plus, les couverts végétaux participent à la régulation des populations de ravageurs. Par exemple, certains mélanges de légumineuses et de graminées abritent des insectes auxiliaires, comme les carabes ou les coccinelles, qui consomment les œufs et les larves de parasites nuisibles. Ce mécanisme naturel réduit la dépendance aux traitements phytosanitaires, contribuant ainsi à limiter l'impact environnemental de l'agriculture.

Stockage du carbone : quand les sols deviennent des puits

Le changement climatique place les agriculteurs face à une double responsabilité : s’adapter à des conditions météorologiques plus extrêmes et contribuer à la lutte contre l’augmentation des gaz à effet de serre. Dans ce contexte, les couverts végétaux s'avèrent être des alliés précieux.

En fixant du carbone atmosphérique par le biais de la photosynthèse, puis en le stockant durablement dans la biomasse et le sol, les couverts végétaux transforment les sols agricoles en puits de carbone. Selon une étude publiée dans la revue scientifique "Geoderma", l'utilisation des couverts végétaux à grande échelle pourrait augmenter de 20 à 40 % le stockage annuel de carbone dans les sols agricoles européens. Une contribution notable pour réduire les émissions globales de gaz à effet de serre.

Une gestion raisonnée de l’eau

Dans les contextes agricoles confrontés à des sécheresses récurrentes, la capacité des sols à retenir l’eau devient cruciale. Certains couverts végétaux, comme le mélange vesce-avoine, améliorent la structure du sol et favorisent sa capacité de rétention hydrique.

En parallèle, les couverts empêchent l’évaporation excessive de l’eau en créant une barrière physique à la surface et en réduisant les effets du vent et du rayonnement direct du soleil sur le sol. Cela peut être déterminant pour préserver les cultures principales en période de stress hydrique.

Quels couverts pour quels bénéfices ?

Les avantages des couverts végétaux dépendent étroitement du choix des espèces semées. Voici quelques exemples adaptés à différents objectifs :

  • Pour l'enrichissement en azote : les légumineuses (trèfle, pois fourrager, vesce) qui fixent l'azote atmosphérique grâce à leurs nodosités racinaires.
  • Pour une biomasse rapide et dense : les graminées (seigle, avoine, ray-grass), idéales pour la lutte contre l’érosion.
  • Pour régénérer les sols compactés : les crucifères (radis fourragé, moutarde) aux racines pivotantes qui ameublissent les sols en profondeur.
  • Pour réguler les bio-agresseurs : certaines plantes à effets spécifiques, comme le sarrasin ou le sorgho, efficaces contre les nématodes du sol.

Le choix du couvert dépend donc des besoins spécifiques de chaque exploitation et de l’objectif visé : agronomique, environnemental ou économique.

Un levier de transition agroécologique

Les couverts végétaux s’imposent comme un outil essentiel dans la transition vers une agriculture durable. Bien qu'ils impliquent une charge de travail supplémentaire et des coûts initiaux liés aux semences, de nombreuses études montrent qu’ils génèrent des bénéfices à long terme, non seulement pour la santé des sols, mais aussi pour la performance des exploitations.

Adopter les couverts végétaux dépasse l’enjeu purement agronomique. C'est un investissement pour l’avenir, ouvrant la voie à une gestion plus résiliente et durable des ressources naturelles. Et si demain, chaque hectare agricole devenait une pièce maîtresse dans la lutte contre l’érosion, les émissions de carbone et le gaspillage des ressources ?

Utilisation de couverts végétaux en agriculture

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